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Le chocolat de Barre Clandestine

Dernière mise à jour : 2 déc. 2024

Ils auraient pu se retrouver autour d'une grande table de réunion, au milieu de cadres encravaté·es, avec rétroprojecteur, présentation PowerPoint, mini croissants et jus d'orange. Jusqu'à la pandémie de Covid (devenu un marqueur de nos vies), Émilie était directrice dans le secteur public, Emmanuel manager en cabinet de conseil.


Eh bien non ! La première fois qu'ils se sont vus, ils avaient les mains dans le chocolat, participants passionnés d'un atelier cacaoté. Ils ont fondu l'un pour l'autre, amicalement, et ont très vite imaginé un avenir professionnel commun. Après avoir écrit leur projet en 2021, formés notamment par Chloé Doutre-Roussel, experte en cacao, ils ont lancé Barre Clandestine en septembre 2022.


Émilie et Emmanuel, heureux parents de Barre Clandestine (photo : Barre Clandestine)

Dans un monde à la fois opaque et concurrentiel, ils ont d'emblée choisi la voie du « from bean to bar », littéralement « de la fève à la tablette ». Dans l'univers du chocolat, le grand public sait peu, voire pas du tout, que les chocolatiers (ceux qui produisent des tablettes, des rochers, des bonbons, des barres, etc.), achètent le chocolat en blocs tout prêts, dit « de couverture », manufacturés par des entreprises qui, elles, partent de la fève de cacao extraite de sa cabosse pour la transformer en chocolat au terme de différentes étapes : fermentation, séchage, torréfaction, malaxage, broyage, affinage, conchage et tempérage. Parmi les purs chocolatiers, on estime qu'un pour cent seulement travaille directement à partir de la fève. En France, les pionniers ont été Bernachon, Stéphane Bonnat ou Pralus. En Belgique, on citera Pierre Marcolini.

CACAO ET CAFÉ, MÊME COMBAT


Émilie et Emmanuel ont opté pour la méthode « bean to bar » en s'inspirant du phénomène des micro-brasseries mais aussi du café de spécialité, qui partage les mêmes terroirs que le cacao. « Les liens sont croisés, remarque Emmanuel. Le café est né en Éthiopie mais est très répandu en Amérique du Sud, tandis que le cacao est né au Pérou mais se trouve beaucoup en Afrique. » C'est ainsi tout naturellement que Barre Clandestine s'est rapproché de l'Arbre à Café, fondé par Hippolyte Courty, pionnier du café de spécialité depuis 2009, qui possède une plantation au Pérou. On trouve les tablettes Barre Clandestine dans les boutiques de l'Arbre à Café et une collaboration devrait voir le jour sur des boissons au cacao, champ d'exploration qui passionne Émilie et Emmanuel, pour la subtilité des arômes qu'elles développent, loin des poudres de notre enfance.

Tri manuel des fèves de cacao torréfiées (photo : Barre Clandestine)

Partir de la fève ne veut pour autant pas dire posséder ses propres plantations. Chez Barre Clandestine, on joue la transparence (jusqu'à ouvrir aux visiteurs la Manufacture sise à Gallarques-le-Montueux, dans le Gard), en mettant en avant les précieux intermédiaires que sont Silva Cacao et Uncommon Cacao. « Ils ne font pas que sourcer du cacao pour nous le vendre, précise Emmanuel. Ils connaissent le pays, les gens, les terroirs, les plantations. Ils donnent surtout leurs indications sur la fermentation en fonction de la génétique des plants, ils vérifient le process, les cycles à respecter. C'est une collaboration essentielle pour nous, la fermentation est une étape cruciale qui se joue dans le temps, là où les industriels la réduise au maximum, voire s'en passe totalement. » Ses spécialistes s'assurent également que les plantations sont socialement responsables, bannissant bien sûr le travail des enfants. En contrepartie, Barre Clandestine achète beaucoup plus cher le cacao (jusqu'à six fois selon les cours), garantissant un revenu décent aux planteurs. Enfin, ils privilégient les plantations pratiquant l'agroforesterie, le plus souvent labellisées bio.

CÔTÉ CLIMAT, ÇA N'EST PAS LE PÉROU...

Le Pérou est le pays le plus représenté dans la gamme de Barre Clandestine mais l'on trouve aussi des crus venus d'Inde, du Belize, de Tanzanie et, plus récemment, de Colombie. « Pour produire des volumes suffisants, nous allons continuer de diversifier les provenances, annonce Emmanuel. Malheureusement, la récolte au Pérou n'est pas bonne cette année. Le pays a particulièrement souffert du dérèglement climatique, avec des pluies à des moments où il faisait chaud d'habitude, et réciproquement. » Pour faire leur choix, ils dégustent à l'aveugle, suivant le protocole de la FFCI (Fine Cacao and Chocolate Institute).


Une tablette qui vous emmène en voyage jusqu'en Tanzanie (photo : Barre Clandestine)


Bien qu'éloigné·es géographiquement, Émilie à la production dans le Sud et Emmanuel à la commercialisation à Paris, les associés sont sur la même longueur d'onde quant à l'identité de Barre Clandestine : des chocolats mono variétaux aux arômes fruités, acidulés, joliment mis en valeur dans un packaging élégant, recyclable et/ou biodégradable. Mais, au final, reste le goût, qui doit être surprenant. Pour cela, outre la sélection des cacaos, la torréfaction joue un rôle majeur dans la sublimation des saveurs intrinsèques de la fève. Elle doit être longue et douce, au degré et à la seconde près (ou tout comme). Une fois les blocs de chocolat confectionnés (avec ajout de sucre de canne non raffiné), ils maturent pendant 3 à 4 semaines. « Le goût évolue beaucoup durant ce laps de temps, constate Emmanuel. Pour les chocolats les plus acidulés que nous aimons, les arômes se diffusent mieux. En revanche, au-delà d'un mois, on ne constate pas vraiment de différence. » Une fois prêt, le chocolat est produit en petites séries pour préserver sa fraîcheur. Parmi les nouveautés à venir, un 100%, quintessence du cacao. De moins en moins clandestines, les barres ont séduit les choc'addicts mais aussi des chef·fes sudistes, tel.les Georgiana Viou, les frères Pourcel, Julien Caligo ou Alexandre Mazzia (work in progress). Les membres du Club des 1 000 étaient parmi les premiers à en croquer, on les reconnaît bien là.

Les autres producteurs mis en avant ce mois-ci :

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