Les couteaux de Simon Ceccaldi
- Stéphane Méjanès
- il y a 4 jours
- 4 min de lecture
Avant de vous raconter l'histoire de la coutellerie Ceccaldi, une anecdote. La rencontre entre Sabrina, la bonne fée qui prend soin des membres au quotidien (entre autres) au sein de la Team Pépites, et Simon Ceccaldi, a pris l'allure d'un gag. Pour mettre en place la première vente, il y a quelques années, Sabrina appelle le coutelier corse :
- « Pour commencer, permettez-moi de vous expliquer le Club. »
- « Pas la peine, je suis membre. »
- « ... »

Simon Ceccaldi, coutellier et membre du Club des 1 000 (photo : DR)
UNE HISTOIRE DE FAMILLE
Dans le petit village de Zoza, en Corse-du-Sud, Jean-Pierre Ceccaldi rêve un jour de travailler de ses mains. En 1978, le jeune homme réalise son rêve et fonde, avec son épouse Dany, son propre atelier de coutellerie artisanale au cœur de la maison familiale. Il a puisé sa passion auprès de Paul Santoni, l’un des derniers maîtres couteliers de l’île, qui lui a transmis les secrets du couteau corse. Les débuts se font modestes, avec la fabrication du curnicciulu, couteau de berger corse traditionnel, puis très vite la gamme s’élargit. Au fil des années, la maison crée d’autres modèles emblématiques comme la Vendetta, mais aussi des couteaux de table, de cuisine, des pliants de poche et des pièces d’exception. Chaque nouvelle création respecte les mêmes exigences : qualité, authenticité et créativité, afin de donner une âme à cet objet du quotidien.
Face au succès grandissant et à l’engouement pour les lames corses, la famille Ceccaldi déménage l’atelier à Porticcio, sur la rive sud du golfe d’Ajaccio. Ce lieu plus vaste et mieux équipé permet de former de nouveaux artisans au sein de l’équipe. Aujourd’hui encore, c’est là que tous les couteaux de la marque sont fabriqués à la main. La transmission est au cœur de cette aventure familiale : Simon et Sylvestre Ceccaldi, fils de Jean-Pierre, perpétuent la tradition. L’aîné, Sylvestre, contribue au développement de la maison, tandis que Simon apporte son regard artistique pour faire évoluer la coutellerie dans un esprit contemporain respectueux de l’héritage insulaire.
DES MATÉRIAUX NOBLES ET IDENTITAIRES
Si les couteaux Ceccaldi séduisent au premier regard, c’est qu’ils respirent le maquis corse. Ici, on sélectionne des matières premières d’exception, à la fois locales et précieuses, pour composer l’identité de chaque pièce. Les lames peuvent être forgées en différents aciers : carbone traditionnel, qui prend avec le temps une patine grisée pleine de caractère, inoxydable moderne, pratique pour un usage quotidien sans entretien poussé, damas feuilleté, aux motifs uniques, fruit d’un travail complexe de forge en plusieurs couches de métaux superposés.
Des outils et des oeuvres d'art à la fois (photo : DR)
Quant aux manches, ils racontent chacun un bout de Corse et de son terroir. Les bois locaux dominent : l’olivier aux veines dorées, le genévrier au parfum résineux, l’arbousier rougeoyant ou encore la bruyère dont la loupe offre d’élégants motifs sombres. À cela s’ajoutent des essences plus rares comme le noyer ou l’ébène pour leurs teintes profondes. La corne de bélier, emblématique des troupeaux corses, et la corne de buffle apportent une touche d’authenticité rustique aux poignées. Certaines pièces d’art intègrent aussi des matériaux précieux : incrustations en nacre irisée, montures ou bagues en argent massif, voire old ivory pour les collectionneurs.
UN SAVOIR-FAIRE ARTISANAL D'EXCEPTION
Entrer dans la boutique-atelier Ceccaldi, c’est ressentir le parfum de l’acier chauffé à blanc mêlé aux effluves du bois poncé, et entendre le rythme du marteau sur l’enclume. Plus que des vendeurs, les artisans de la maison sont de véritables couteliers-forgerons, maîtrisant l’ensemble des techniques de la conception au produit fini. Les lames peuvent être forgées à l’ancienne, chauffées au rouge et martelées sous le marteau pour leur donner forme et dureté, selon la méthode séculaire de la forge corse.
Mais, la maison Ceccaldi sait aussi employer des techniques modernes de découpe dans la masse : la silhouette de la lame est découpée dans des tôles d’acier de qualité puis meulée avec précision. Vient ensuite l’étape cruciale de la trempe : la lame est montée en température (jusqu’à environ 840°C pour un acier au carbone, 1 040°C pour l'inox) puis refroidie brutalement à l’huile ou à l’air, afin de lui conférer sa dureté optimale. Un revenu au four à plus basse température vient détendre le métal pour éviter la casse, avant que chaque lame ne soit de nouveau meulée, polie, puis affûtée à la main.

Un artisanat de l'oeil et du geste (photo : DR)
Cette maîtrise parfaite de la métallurgie et du geste artisanal permet d’offrir une garantie à vie sur chacun des couteaux. Ici, chaque pièce sortie de l’atelier doit pouvoir traverser les générations. Du dessin initial à l’aiguisage final, en passant par le choix rigoureux des matériaux et le traitement thermique, rien n’est laissé au hasard. Cette exigence se ressent dans la prise en main et dans la coupe. Un couteau Ceccaldi, ce n’est pas juste un bel objet à exposer dans une vitrine : c’est un compagnon de table ou de bivouac fait pour servir au quotidien avec fiabilité, tout en incarnant une part de l’âme corse. On sentirait presque la garrigue et les châtaigniers en le prenant en main.
HÉRITAGE ET RAYONNEMENT
Fidèle à sa devise d’allier authenticité et modernité, la Maison Ceccaldi continue d’innover sans renier ses racines. La nouvelle génération insuffle des idées fraîches, design épuré, lignes contemporaines, tout en restant dans le droit fil de la tradition insulaire. Cette approche a valu à l’atelier une reconnaissance prestigieuse : il est désormais labellisé « Entreprise du Patrimoine Vivant », une distinction d’État saluant les entreprises françaises au savoir-faire artisanal d’excellence. Ce label consacre le rôle de Ceccaldi comme gardien d’un patrimoine culturel, tout en soulignant son dynamisme et sa capacité d’adaptation.
Aujourd’hui, les couteaux Ceccaldi voyagent bien au-delà des montagnes corses. La maison a essaimé des boutiques jusque sur le continent, notamment à Paris (quartier de l’Odéon), sans oublier ses échoppes de Bonifacio, Corte et Sartène, en plus de l’atelier principal de Porticcio.
Garantis à vie, affûtés gratuitement à vie pour les propriétaires de passage en boutique, ces couteaux d’exception ne demandent qu’à s’inscrire dans la vie de celui ou de celle qui s’en sert au quotidien. C’est sans doute là le secret de longévité de la maison Ceccaldi.






